Hélène Messier dresse un bilan positif du congrès 2024 de l’AQPM
La présidente-directrice générale de l’Association québécoise de la production médiatique estime que le congrès annuel a été très positif, entre autres, par le nombre de personnes inscrites. Le Gala a réuni plus de 450 personnes. Du côté des conférences, elle croit que les panels étaient très instructifs et, parfois, divertissants. « Je crois que nous avons rejoint beaucoup de préoccupations du milieu », confie-t-elle à Qui fait Quoi. On a eu droit à un portrait économique de l’industrie et aux tendances en matière de longs métrages, de séries et de formats. »
Les thématiques abordées lors du congrès de l’AQPM rejoignaient plusieurs types de productions, de producteurs et d’entreprises. Certaines conférences étaient plus technologiques, comme celle sur les tournages sur écrans virtuels et celle sur l’intelligence artificielle. Il y a aussi eu les entrevues avec le ministre de la Culture et des Communications du Québec, Mathieu Lacombe, et de la ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge. « Je pense, et les commentaires que j’ai reçus le confirment : ces deux entrevues ont démontré que les deux ministres sont réellement engagés, note Hélène Messier. Ils sont dévoués à soutenir l’industrie et la culture. Tous les deux ont posé des actions, autant au provincial qu’au fédéral, et on a senti leur volonté d’en faire davantage. »
La PDG de l’AQPM a même senti un sentiment d’urgence dans le cas de la ministre St-Onge, avec les élections qui auront lieu d’ici un an et demi. « On voit qu’elle a l’intention de remplir plusieurs engagements, poursuit-elle. Et le ministre Lacombe aussi a de grandes ambitions, particulièrement en ce qui a trait au financement. On voyait récemment qu’il a participé à la divulgation du rapport sur l’état de la langue française. Il tient fermement à ce qu’on puisse découvrir plus facilement les contenus francophones sur les plateformes numériques. Des choses vont bouger dans l’industrie. »
Par ailleurs, le secteur de l’audiovisuel va aussi être confronté à des dossiers qui vont changer l’état de l’industrie. On attend des décisions du CRTC sur le financement des plateformes, une définition du contenu canadien, le nouveau modèle de financement de l’audiovisuel, la présence des contenus francophones sur les plateformes numériques… Tout cela va changer le visage de l’industrie, estime Hélène Messier. « Je pense qu’il faut s’aventurer là-dedans avec optimisme, mais qu’il faut aussi garder l’oeil ouvert, car plusieurs dangers peuvent nous guetter. »
La crainte de voir un gouvernement conservateur arriver au pouvoir dans un an et demi inquiète la PDG de l’AQPM. Lors de son entrevue pendant le congrès avec la ministre de Patrimoine canadien, elle a particulièrement nommé la conservatrice Rachel Thomas, qui est membre du comité permanent du Patrimoine canadien et qu’elle a beaucoup fréquentée pendant l’étude du projet de Loi C-11, et que l’on voit à l’œuvre dans différents dossiers. Il s’agit de la même personne qui a demandé à la ministre St-Onge de s’exprimer en anglais lors d’une comparution. « Alors, il est certain que si elle devient porte-parole en matière de culture, ça peut être inquiétant pour le milieu [francophone] », note Hélène Messier.
Elle espère que, d’ici la prochaine élection fédérale, les processus seront assez avancés pour qu’un éventuel gouvernement conservateur ne puisse reculer. Elle pense notamment à la nomination d’un nouveau président ou d’une nouvelle présidente à Radio-Canada, mais aussi aux décisions du CRTC pour mettre en œuvre C-11.
Parmi les dossiers qui occupent actuellement l’équipe de l’AQPM, on note les négociations d’ententes collectives, notamment avec l’Union des artistes, un syndicat important aux yeux d’Hélène Messier. L’association des producteurs se trouve actuellement en négociations pour le renouvellement des ententes avec l’AQTIS 514 IATSE. « Avec l’UDA, les discussions vont bien par ailleurs, mais ça avance lentement parce que, justement, on parle notamment de droit de suite, note-t-elle. Il faut voir comment adapter le système aux nouvelles plateformes et à la place qu’occupe maintenant la télévision linéaire dans l’ensemble du portrait. C’est un enjeu important. »
Le financement de la production demeure une préoccupation ; le fédéral a pris des engagements sur les enveloppes du Fonds des médias du Canada et sur l’engagement de la part de l’enveloppe francophone à 40 % plutôt qu’un tiers. « Nous attendons aussi que le CRTC dévoile son nouvel échéancier pour les consultations qui s’en viennent, ajoute-t-elle. Alors, nous serons probablement engagés, dans les prochains mois, à rédiger de nouveaux mémoires. Et on attend aussi cette fameuse décision sur C 11 qui porte sur la contribution initiale des plateformes numériques. Il y aura donc de l’argent neuf injecté dans les fonds existants, que ça soit au FMC ou dans des fonds indépendants certifiés. Il y aura des discussions sur la façon dont cet argent sera employé. Et puis, il va y avoir une mise à jour économique à l’automne et nous avons déjà commencé à travailler sur nos demandes. Nous voudrions, entre autres, pérenniser la hausse du budget de Téléfilm Canada. » Cela est d’autant plus important qu’il ne reste qu’un budget avec les élections. Car si un gouvernement moins porté sur la culture est élu, il sera plus difficile d’enlever des mesures que de ne pas les renouveler.
Le mandat de grève donné par les membres de la Writer’s Guild of Canada au syndicat préoccupe aussi la PDG de l’AQPM, d’autant plus que plusieurs producteurs membres de l’association travaillent également en anglais. Elle craint un effet d’entraînement. « On voit un durcissement des positions dans la société en général et dans les négociations syndicales, explique-t-elle. Nous ne sommes pas à l’abri de ça au Québec. Mais je le répète, pour l’instant, les discussions qu’on a avec les différents syndicats vont bien. Le ton est harmonieux. Mais, évidemment, comme on dit, ce qui traîne se salit, alors il ne faudrait pas que cela traîne trop longtemps. Il faut qu’on puisse renégocier des conditions qui soient intéressantes pour toutes les parties. »
Comme Hélène Messier l’a fait avec les ministres, nous lui avons demandé si elle était optimiste pour l’avenir. « Je suis toujours optimiste parce que sinon, je pense que je ne pourrais pas faire ce travail, répond-elle. Je suis ici pour aider à améliorer les conditions de l’industrie et je vais continuer de me battre pour que ça soit le cas. »