Transmettre des messages positifs aux ados sur les différentes plateformes audiovisuelles
Alors qu’il est facile de passer des messages positifs aux jeunes de 3 à 10 ans dans les émissions jeunesse, il s’avère plus difficile de parler santé, éducation et sexualité aux préadolescents et aux adolescents plus rébarbatifs à la promotion d’habitudes de vie plus saines. Pour discuter des meilleures façons de joindre ce public, l’Alliance Médias Jeunesse a rassemblé Judith Gaudet, chercheure membre du Groupe de recherche Médias et santé (GRMS), professeure associée à l’Université du Québec à Montréal, Amy Friedman, présidente de Redhead Consulting, Anthony Gurr, designer de jeux vidéo et Carla Seal Wanner, directrice du secteur pédagogique de Flickerlab.
Judith Gaudet a eu le temps de se pencher longuement sur la promotion de la santé chez les jeunes alors qu’elle était conseillère et productrice au contenu de la série Ramdam, produite par Vivavision. Le fruit de cette réflexion, elle l’a livré dans une recherche, Comment promouvoir la santé en contexte de fiction télévisuelle jeunesse ? Bilan des connaissances et étude de cas de la série Ramdam (que l’on peut consulter en ligne). « Dans le cas de Ramdam, il s’agissait d’une comédie pour les adolescents, donc ce n’était pas dans l’intention des créateurs de parler de santé dans tous les épisodes, explique Judith Gaudet. Dans la moitié des 185 épisodes, la moitié abordait le sujet de la santé physique, soit par le biais de la santé contextuelle et évoquée ou de la santé en tant que sujet dramatique, principalement quand des personnages faisaient face à la maladie ou de l’activité physique. Dans le cas de la santé évoquée, cela se faisait de manière active - un jeune faisait du sport - ou passive - par un élément de décor - , mais pas toujours intentionnelle. »
Dans le contexte d’une émission de fiction, il faut faire passer le message sans le marteler car les adolescents ne sont pas dupes et risquent de rejeter le message en bloc. « Le jeune peut ressentir une perte de liberté ou encore développer une contre argumentation, précise la chercheure. On ne peut pas non plus faire appel à la vulnérabilité des jeunes puisqu’ils ont une pensée magique et se sentent invulnérables. Il faut donc passer par l’identification et la similitude. » Le GRMS a mis en ligne le blogue C’est malade, avec l’Université du Québec à Montréal (UQAM), en collaboration avec l’Alliance Médias Jeunesse (AMJ), grâce à un financement du Fonds de Recherche sur la Société et la Culture (FQRSC). Les professionnels des médias jeunesse y trouveront de nombreuses ressources d’information et d’inspiration.
« Les jeunes sont immergés, tout comme les adultes dans la technologie, souligne Carla Seal Wanner, de Flickerlab, un studio de production multimédia pédagogique. Selon un sondage américain, 80 % des enfants préféreraient qu’on leur enlève la télévision plutôt que l’Internet. Cependant, pour les créateurs, la ligne entre l’éducation formelle et l’éducation informelle devient plus floue. Pour les enfants qui n’ont pas accès aux ressources à l’école ou à la maison, Internet devient un outil d’apprentissage qui leur permet de comprendre la complexité du monde. » Carla Seal Wanner rappelle que le Canada a une longueur d’avance sur les États-Unis dans la réflexion sur les contenus destinés aux jeunes, ce qui n’empêche pas des initiatives intéressantes chez nos voisins du sud, dont le Project 3650, qui permet de donner aux jeunes de l’information sur les changements climatiques d’une façon ludique tout en demeurant éducative.
Après plus de 20 ans chez Nickelodeon, Amy Friedman a fondé Readhead Consulting, une firme de valorisation de la marque et de développement de contenus pour tous les médias. Elle connaît la création de contenus pour les jeunes sur le bout des doigts. De ces années dans le milieu, elle a compris que, pour toucher les jeunes, il faut éviter de les réprimander. « Cela ne marche pas et les jeunes détestent ça, affirme Amy Friedman. N’utilisez pas de tactique de peur et ne montrez pas un problème qui n’a pas de solution. Pour faire passer un message, on peut « emprunter de la crédibilité ». Par exemple, Lady Gaga n’est pas une bonne porte-parole pour l’écologie, contrairement à Cameron Diaz. » Il est également important d’utiliser le bon outil, soit la télévision, le Web ou encore la communauté. Ainsi, la télévision permet de raconter des histoires, le Web de connecter les jeunes, mais le plus important demeure la communauté, croit Amy Friedman.
Anthony Gurr estime qu’on a trop souvent une image négative des jeux vidéo. On pense à Grand Theft Auto ou à Assassin’s Creed et on voit les jeunes devant leur console comme des zombies accros. « Les jeux vidéo peuvent être une expression créative reflétant la culture et les valeurs des ancêtres, pense Anthony Gurr. Les jeux bien conçus peuvent être engageants et imaginatifs. Internet permet de construire des communautés de partage de connaissances, lesquels s’avèrent des outils de collaboration. On peut penser notamment à FarmVille, jeu sur Facebook ou Zynga, 62 millions de personnes y jardinent tous les jours. Club Penguin, un jeu développé au Canada, démontre bien que les enfants aiment jouer avec des amis et collectionner des points. Il existe de nombreux jeux qui permettent de résoudre des problèmes, je pense entre autres à Plant vs Zombies, Angry Birds ou Little Big Plant, il y en a pour tous, des petites filles aux grand-mères. »